5 février 2012

L'audit de la dette publique est-il legitime?

Ou : deux fantasmes collectifs a la mode.

Certaines voix s’élèvent pour contester la légitimité de la dette publique, en France et dans d’autres pays. Ils souhaitent la vérifier, l’ «auditer », en constater l’origine, et envisagent de contester, au moins pour la forme, que cette dette soit entièrement à rembourser ou soit à la charge de la communauté nationale en général. Plusieurs candidats à l’élection présidentielle ont officiellement admis cette notion d’audit et accepte le principe d’une action politique inspirée de ses conclusions.
Mais ce débat lui-même, est-il légitime ? Non, et il expose certaines aberrations collectives du moment.

Position du problème

On peut comprendre qu’il soit embarrassant de rembourser une dette. Si on pouvait s’en dispenser, on le ferait. Mais si la dette est légitime, il n’y a aucune raison de droit ou de morale de ne pas la rembourser. Alors, qu’est-ce qu’une dette «légitime » ? Ce mot peut être pris dans trois sens différents.

 Celui de la conformité   aux lois.

 La dette française a été établie sur des contrats clairs et valides, conformes au droit français et européens et que personne ne conteste juridiquement. Il existe bien, dans la doctrine des relations internationales, le concept de « dette odieuse »: pour faire simple, cette notion intervient lorsque la dette a été contractée en-dehors d’un contrôle démocratique normal (dictature), ou dans des conditions telles que le caractère déraisonnable et antiéconomique de l’endettement ne pouvait échapper aux créanciers (tiers-monde). Ce concept ne s’applique ne s’applique évidemment pas à la France.

 Celui de la conformité à la raison et au bon sens.

Cette notion est en cause lorsqu’une personne, une entreprise, un pays, s’endette au-delà de toute raison et de toute capacité à rembourser, pour toutes sortes de motifs. De l’ « intérieur  »  de l’emprunteur, mais souvent après coup, l’endettement peut atteindre un niveau tel qu’il dépasse toute capacité de remboursement. Du point de vue du prêteur, ce stade de non-légitimité  n’est atteint qu’au moment où il est lui-même en mesure de savoir que l’emprunteur ne pourra pas rembourser. A ce point peut commencer la perte de légitimité de la dette. C’est l’origine par exemple de la notion de « soutien abusif » d’une banque a une entreprise en faillite : une banque qui prête à l’entreprise ce qu’elle ne pourra manifestement pas rembourser peut être condamnée à payer elle-même le passif supplémentaire créé par  la prolongation intempestive de l’activité. Rien dans le cas de notre pays-qui n’a jamais fait défaut dans l’histoire moderne, détenait la meilleure notation d’agence, a une situation politique et un système fiscal stables, est l’un des pays les plus riches du Monde-ne pouvait le classer dans la catégorie des emprunteurs déraisonnables. Si on ne prêtait pas à la France, on ne prêtait à personne.

Reste le sens de légitime comme «conforme à l’équité et à la justice ». 

L’équité est ici attaquée sous deux angles. On peut évoquer la question des intérêts : pour certains il ne serait pas juste de payer, a des banques privées ou à des investisseurs, les intérêts de la dette. Directement adaptée d’une analyse d’époque de Karl Marx, cette approche estime que les intérêts sont une rente indue fournie aux détenteurs de capitaux (Le Capital, Livre I) :

La dette publique devient un des leviers les plus puissants de l’accumulation du capital. Par un coup de baguette magique, elle dote l’argent par nature improductif du pouvoir reproducteur et le convertit ainsi en capital: A-A, sans quil ait à subir les risques inséparables de sa transformation éventuelle en marchandise: A-M-A.

Dans la conception marxiste, l’emprunt public est dès l’origine diabolisé, au motif, pour le dire avec les mots actuels, qu’il fournit une opportunité de placement sans risque et non productif a ceux qui ont de l’argent à investir permet donc d’accumuler la richesse sans cause légitime.

Deux angles d’attaque

Sur ces bases idéologiques le débat se déploie aujourd’hui sur deux volets distincts.

La remise en cause des intérêts : le recours au financement  privé des déficits publics est contesté en tant que projet visant à gonfler indument les bénéfices des banques, et on souhaite un financement de l’Etat par la Banque Centrale, ou à la rigueur au travers d’un système bancaire public.

Celle du principal : on dénonce la politique fiscale pro-capitaliste (ou « de droite ») qui consiste à modérer les impôts, ce qui toutes choses égales par ailleurs augmente le besoin de financement de l’Etat et le pousse à emprunter. Mais Marx voyait ça dans l’autre sens : les dépenses de l’Etat entrainent l’endettement qui rend l’impôt nécessaire, et cet impôt est un instrument de l’asservissement du peuple:

Comme la dette publique est assise sur le revenu public, qui doit en payer le remboursement et les intérêts, le système moderne des impôts est le corollaire obligé des emprunts et donc des dettes publiques.(…)L’influence délétère qu[e ce système ] exerce sur la situation des salariés s’est accompagnée historiquement de l’expropriation massive et forcée des paysans, des artisans, et des autres éléments de la petite classe moyenne.

Alors l’impôt, antisocial ou au contraire anticapitaliste? Visiblement, ça  dépend fortement de qui la rembourse : les débats actuels sur la réduction des déficits publics achoppent constamment sur la question de la répartition de l’effort selon les classes sociales. La polémique sur la légitimité de la dette menaçante contractée débouche encore une fois sur les débats de la répartition des revenus, et la question se dédouble. D’une part, est-il légitime de demander au peuple français, dans son ensemble, de rembourser la dette s? D’une part, la dette est-elle partiellement illégitime pour avoir profité plus à certains qu’a d’autres ?

1)      Est-il « légitime » de payer des intérêts sur la dette de l’Etat ?

Cela surprend ceux qui raisonnent spontanément de manière financièrement orthodoxe, mais cette question est posée sérieusement, et elle est quantitativement significative : de fait, les intérêts nets cumules, en euros courants, par les administrations publiques de 1949 à 2009 représentent plus de la moitié de l’encours de dette à la fin de la période.  En l’absence d’intérêts composes,  la dette serait quasiment inexistante. La tentation est grande de dire que les intérêts sont la cause de tous les problèmes.

La remise en cause de la légitimité des intérêts suppose implicitement que l’Etat pourrait se financer gratuitement ou que les intérêts qu’il verse soient collectivises, au lieu de rémunérer des apporteurs de capitaux. Dans les deux cas, cela signifie que l’Etat est finance par une entité capable de lui apporter  des financements sans se soucier de leur origine ni de leur rémunération, donc de type Banque Centrale. C’est précisément ce qui est proposé par certains qui,  constatant les contraintes posées aux finances publiques par les niveaux d’endettement atteints, y voient un moyen de les  lever.

On peut effectivement imaginer que les dépenses excédentaires de l’Etat soient systématiquement couvertes par un compte d’avance à la Banque de France ou refinancées par des titres de dette souscrites par la BDF. Les montant des dépenses de l’Etat qui excède ses recettes vont alors créditer les comptes de dépôt des agents économiques, avec comme contrepartie un gonflement des réserves des banques auprès de la BDF.
 Ce système dit de «  monétisation primaire » parait idéal, il est pourtant interdit dans tous les pays un peu sérieux ! Paradoxe ? Depuis 1971, date à laquelle les Etats-Unis ont décidé de détacher la valeur du dollar de la référence à l’or, les principales monnaies ne sont contraintes par aucune obligation directe ou indirecte de conversion en actif tangible. La monétisation primaire pourrait donc s’envisager sans aucune limite formelle. On peut donc justement  imaginer qu’un gouvernement, soucieux du bien-être des citoyens ou simplement soucieux de se maintenir, satisfasse sans limite les besoins exprimes (besoins qui  eux-mêmes auraient peu de raisons de se limiter puisque dans ce système  l’ « argent » est gratuit et toujours disponible). On voit le problème : comme tout « bien », la monnaie doit finir par perdre sa valeur (c’est-à-dire qu’il y a inflation) si on peut en obtenir gratuitement autant que nécessaire. Plus précisément, la création monétaire qui correspond, dans ce schéma, aux déficits publics, stimule l’activité jusqu’à ce qu’elle se heurte aux limites physiques de la capacité de production : la croissance économique potentielle est définie par celle de la population active et de la productivité. Survient donc un moment ou la création monétaire issue du déficit n’est plus compensée par un surcroit d’activité réelle et se traduit en inflation.

On pourrait objecter ici que cette création monétaire peut être compensée par un drainage des réserves bancaires opéré, à due concurrence, par la Banque Centrale. Ce drainage doit prendre la forme de ventes définitives d’actifs non monétaires aux banques. Mais il faut rappeler que nous étudions ici la possibilité d’un financement par la Banque centrale en tant que principe politique (écarter les intérêts prives du financement des besoins déficits) établi dans la durée (Il ne s’agit pas de discuter de l’utilisation ponctuelle de cet outil ou des relances keynésiennes, qui sont d’autres sujets). Le  drainage des réserves aboutit donc à une situation contradictoire : la monnaie régulièrement  injectée par le Trésor d’un cote, est retirée de l’autre…en cédant régulièrement aux investisseurs prives des actifs qui seront en réalité des titres de dettes, et forcement rémunérés. On voit que si  on veut parer à l’inflation systématique, on réintroduit par la fenêtre le financement prive de la dette qu’on avait justement  voulu mettre à la porte. 

Et en l’absence de ce drainage, nous avons un cas de figure dans lequel  la masse monétaire, de manière systématique, sera abondée chaque année d’un montant équivalent a 3% de PIB par exemple (montant moyen des déficits 1974/2010) en supplément de la monnaie créée par le système bancaire en réponse aux besoins de l’économie. Cela sera facilement anticipe par tous les agents économiques, résident s et non-résidents. Tous les éléments sont donc en place pour, à terme, produire une inflation croissante et déstabiliser la monnaie. Ce n’est pas un hasard si l’autodiscipline-l’ interdiction de financement direct du Trésor par la BDF-a été prévue par la loi en 1973, au moment où l’ancrage des monnaies a l’or disparaissait complètement : les possibilités illimitée de la création monétaire auraient pu sans cela causer une forte instabilité des échanges internationaux, il aurait été impossible de bâtir le Serpent Monétaire Européen nécessaire au Marche Unique, etc…Financer la dette par création monétaire supprime la dépendance au marché obligataire, mais le « méchant » de l’histoire est alors le spéculateur sur les monnaies, qui voit s’ouvrir un boulevard d’opportunités. Vouloir supprimer à la fois profits,  spéculation et  intérêts prives est chercher un Graal.

Plus que la méthode elle-même, c’est donc son utilisation de manière potentiellement abusive et systématique qui justifie son « interdiction » et ceci avec raison, car croire que les gouvernements équilibreront  les budgets par le seul effet de leur vertu est hasardeux, surtout dans un pays ou, comme dans d’autres, on a des qu’on a pu le faire (changes flottants) enregistre des déficits ininterrompus pendant des décennies. L’obligation de se financer par le système financier impose à l’action de l’Etat un filtre de crédibilité et de mesure dans ses actions.  

On voit d’ailleurs que c’est précisément au moment où les déficits deviennent inacceptables que e moyen de les faire « passer » de manière indolore est réclamé. Les motivations sont claires, des intérêts politiques et sociaux sont en jeu. Un financement par monétisation est délibérément inflationniste. Si une forte inflation survient, elle va modérer  le poids de la dette par rapport au PIB, faciliter son remboursement ainsi que la poursuite de l’endettement et des politiques de soutien de la demande. L’inflation, d’une manière générale, avantage les débiteurs-classes moyenne et populaire-qui sont endettées et/ou sont bénéficiaires des politiques de soutien, et pénalise ceux qui ont du patrimoine et   apportent des capitaux. Elle permettrait de reprendre aux retraites le pouvoir d’achat qu’ils ont accumule. Mais si l’inflation est mal contrôlée, tout le monde sera  perdant.

L’idée selon laquelle l’Etat s’est interdit de battre monnaie dans le cadre d’un « complot de classe » visant à transférer des richesses aux capitalistes-banquiers est donc inutile pour comprendre cet acte d’autodiscipline : Il visait à conserver à la monnaie, support des échanges et moyen de stockage de la richesse, un minimum de stabilité. Mais cette idée de complot est finalement très cohérente avec la logique traditionnelle de la lutte des classes, puisque basculer délibérément dans l’indiscipline tendrait à déposséder les possédants et à  décrédibiliser l’idée d’investissement prive jusqu’à l’effondrement, a la limite, de l’économie de marche, tout en organisant-en apparence-l ‘accès du plus grand nombre à la prospérité (payée en monnaie dévaluée). Des variantes peuvent essayer d’éviter la spirale inflationniste en ressortant de vieux outils d’encadrement du crédit ou même, allant au bout de la logique, en réservant au secteur public le droit de créer de la monnaie. 
Mais si on ne suit pas sur ces chemins incompatibles avec la marche normale de l’économie française dans l’économie mondiale ou simplement utopistes, on conclut qu’il est légitime et sain d’avoir à payer et à financer des intérêts sur la dette de l’Etat et que l’Audit de la dette ne trouvera rien à se mette sous  la dent ici. Cette conclusion, bien entendu, s’applique partout, y compris aux pays  en difficulté de la zone euro. Mais elle n’empêche pas que la monétisation puisse être un outil à utiliser dans le cas de profondes difficultés économiques ou de crises aigues (c’est d’ailleurs ce que fait actuellement la BCE, indirectement, lorsqu’elle ouvre aux banques des facilites monétaires qui seront utilisées pour acheter les emprunts émis par les Etats pour refinancer leurs dettes ou couvrir leurs nouveaux déficits). On peut d’ailleurs critiquer le montage de la zone euro en pointant son biais déflationniste : sa logique fondamentale est que les Etats doivent faire en sorte de disposer d’un financement préalable de leurs dépenses. Il faut cependant se rappeler que ceci est la conséquence directe d’une unification monétaire sans unification politique, cette dernière étant justement en chantier en ce moment. Et même si la critique est juste, elle ne justifie pas l’extrémisme de certaines positions. Notre conclusion n’est donc pas que l’Etat doive toujours se conformer à une autorisation de dépense donnée ex ante par le système financier, et le système euro devra bien évoluer. Elle est que le financement de ses dépenses, ex post, par des capitaux portant intérêt est non seulement légitime mais salutaire. Le financement gratuit et illimites des déficits publics par une banque centrale est un fantasme collectif.

2)      Ou est passe l’argent, le peuple doit-il vraiment tout rembourser ?
La question n’est pas toujours triviale, notamment dans le cas des « dettes odieuses » ou l’argent a profité a des intérêts prives. Mais qu’en est-il chez nous ? Le débat sur la légitimité peut emprunter emprunte trois directions : l’analyse de l’affectation globale des dépenses, celle de l’identité des créanciers de l’Etat, et la sulfureuse notion de « clientèle ».

a)      Les dépenses globales

Chacun connait en gros de quoi est fait le budget des administrations : traitements, prestations sociales pour l’essentiel, des consommations de biens et services et quelques investissements. On a vraiment le sentiment que l’argent est allé dans la poche des français. Notre étude globale sur le Modèle Social montre d’ailleurs que l’équilibre des finances publiques a été globalement sacrifie en faveur du soutien de la consommation et des situations précaires. Mais on peut aligner ici quelques chiffres simples.
Le cumul des déficits de l’Etat de 1949 à 2009 peut se comparer aux excédents/déficits des autres secteurs de l’économie :

Administrations publiques
1,370.3
(deficits)
Sociétés non financières
-680.3
Sociétés financières
434.9
Ménages et Inst. sans but lucratif
1,498.2
ISBLSM
Nation
-117.5

Sur ces 60 années la Nation présente un déficit minime. L’étranger a reçu 117 milliards qui, retranches aux 1370 de déficits publics, laissent une source de financement pour le secteur prive de 1253 milliards, au sein duquel Les sociétés sont déficitaires pour 245 milliards. Les ménages ont donc reçu 1498 (1253+245) milliards d’euros en cumule sur cette période. Si on resserre l’examen sur les relations de transfert entre les ménages et les administrations (sans compter les traitements des fonctionnaires, qui rémunèrent un travail) le solde est encore plus élevé : 2378 milliards.

Emplois
Ressources
impots payes
3132
prestations (especes)
7446
cotisations sociales
8200
prestations (nature)
6080
Transferts en capital
141
excedent
2378
subventions
43
total
13710
13710












Tous ces chiffres sont des cumuls convertis en euros de flux de toutes les époques, mais il en est de la même du chiffre de la dette dont il est question.

On constate-c ‘est loin d’être une surprise-que les déficits ont financé  les ménages. Approximativement, ceux-ci ont reçu 2378 milliards de transferts nets de l’administration. Les administrations accusent un déficit de 1370 seulement car elles reçoivent la différence des entreprises (1008). Donc les entreprises financent l’Etat qui, lui, a redistribue aux ménages 2.4 fois ce qu’il a reçu et s’est endette au passage. On a du mal à dénoncer un scandale, d’autant que les grandes masses rappelées ci-dessus décrivent une politique de redistribution dont on a vérifié, par ailleurs, l’effectivité.

b)      Les créanciers

Un autre biais pour mettre en cause la dette publique est de questionner sur ses détenteurs. Les obligations d’Etat, après leur émission, peuvent être échangées sur des marchés ouverts aux investisseurs internationaux. La part de la dette française détenue par des non-résidents est de 60% environ, dont les deux-tiers sont hors zone euro. La détention de la dette à l’étranger est logique puisque les banques centrales des pays exportateurs doivent recycler les euros obtenus. Certains se formalisent en particulier du fait qu’une part importante  de la dette détenue dans des pays à fiscalité favorable à l’investissement. Mais lorsqu’on regarde la liste des 50 plus gros détenteurs d’obligations étatiques françaises, on constate  qu’il s’agit de grosses compagnies d’assurance, de gestionnaire de fonds obligataires et de retraites, pas de hedge funds. Que des spéculateurs interviennent sur les marches de dette est une évidence, mais leur rôle est marginal et en tout état de cause ils n’ont pas créé la dette. Les spéculateurs qui en détiennent ont eu au moins le mérite de l’acheter au moment où les investisseurs de long terme s’en débarrassaient.

c)       La question des « clientèles » de l’Etat

C’est l’angle d’attaque le plus préoccupant car il révèle une conception dévoyée de la démocratie et de l’action politique. La légitimité d’une partie de la dette contractée par la France est contestée du fait que certaines mesures ayant augmenté les dépenses ou réduit les recettes auraient été prises dans le souci de bénéficier a des catégories particulières ou même à un électorat particulier. Ces accusations se  concentrent sur une période assez récente. Elles relèvent cependant d’une logique complètement inacceptable.
Bien entendu, la critique et l’opposition politique sont des droits imprescriptibles, mais remettre en cause la légitimité de l’impact budgétaire de mesures avec lesquelles on est en désaccord, mais prises dans le respect des institutions, est très dangereux. Accepter ce comportement validerait des pratiques politiques revanchardes ou le pouvoir est censé permettre un détournement de richesse au profit d’une tribu ou d’un clan, ou l’alternance est l’occasion de faire rendre gorge aux profiteurs précédents et de les remplacer par de nouveaux prébendiers (dans le cas précis de l’action sarkozyste, il faut bien reconnaitre de surcroit que les mesures incriminées sont parfaitement en accord avec les lignes du programme qui a commandé son élection. Bonnes ou mauvaises, leur légitimité au sens examiné ici est inhabituellement  inattaquable).
Ce n’est pas ainsi que les institutions fonctionnent, sinon, chaque catégorie pourrait à bon droit refuser de payer la note fiscale ou sociale de ce qu’il estime ne pas lui profiter. Les jeunes pourraient contester la part des cotisations sociales qui correspond au passage de l’âge de la retraite de 65 à 60 ans décidé en 1981. Les rentiers contesteraient d’avoir à payer pour certaines mesures sociales ou pour les 35 heures. Ceux qui travaillent pourraient vouloir défalquer de leurs contributions la part qui finance le RSA ou le chômage. Parlant de RSA, pourquoi remettre en cause le supplément de dette censé provenir de certaines mesures fiscales de la loi TEPA en oubliant que cette loi instaure le RSA, qui a un cout, etc...

On n’en sortirait pas, il est impossible de fonctionner de cette façon : la solidarité et la cohésion nationales, valeurs chères a beaucoup, consistent aussi à accepter, de bon cœur ou pas, ce qui a été régulièrement fait par les pouvoirs publics, même si on en conteste (au nom de critères dont ne pourra jamais démontrer le caractère universel) l’opportunité ou la « justice ». Quitte éventuellement a le défaire par les mêmes voies, pourquoi pas. Si la loi L a entrainé des couts X, on peut abroger ou modifier la loi L, mais le cout X est pour la collectivité nationale. On ne peut invoquer en interne le caractère « odieux » d’une dépense légalement supportée, et vouloir faire « rendre gorge »est une attitude de nervi. La possibilité d’une alternance politique suppose par essence d’assumer l’historique politique, sinon c’est une guerre civile qui ne dit pas son nom. Le découpage en tranches de la dette selon sa légitimité est un fantasme collectif.


Le questionnement sur la légitimité de la dette est donc difficilement compréhensible. Certes, la dette constatée aujourd’hui subit le poids des intérêts historiques, mais qui peut valablement dire où nous en serions si plusieurs décennies de déficits avaient été monétisés, ou si nous étions restes dans l’économie administrée de la Libération ?  Certes, on peut débattre démocratiquement de la répartition d’un éventuel effort d’austérité entre les français, mais peut-on vraiment opposer un « peuple » irresponsable a d’obscurs intérêts qui les auraient exploites, ou peut-on rétrospectivement opposer entre elles différentes catégories de français ? La rhétorique de l’audit et de la légitimité est-elle autre chose qu’une autre tentative désespérée de lever les obstacles de la gestion et  de poursuivre les politiques de soutien  à la consommation et de perfectionnement du « modèle social » malgré toutes autres considérations?

1 commentaire:

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